Pas de justice reproductive sans Palestine libre
Déclaration de la Coalition pour le droit à l’avortement au Canada
Au cours des 150 derniers jours, nous avons assisté avec horreur et tristesse aux pertes inimaginables subies par les communautés palestiniennes, musulmanes, arabes et juives. Durant cette période, l’équipe de la Coalition pour le droit à l’avortement au Canada s’est activement informée sur la situation, tout en gardant un regard critique, afin de mieux orienter nos efforts de solidarité. En parallèle, nos membres ont individuellement pris part à diverses activités dans leurs villes et provinces respectives. Tandis que nous prenions le temps de vivre ces émotions fortes et de poursuivre un apprentissage crucial sur ce qui se passe dans le monde qui nous entoure, nous avons aussi réfléchi de manière critique aux fondements de la justice reproductive, sur lesquels repose notre travail à la Coalition pour le droit à l’avortement au Canada.
La justice reproductive est une posture critique afroféministe selon laquelle la justice n’est atteinte que lorsque tout le monde a le droit à l’autonomie corporelle, a le droit de devenir parent ou de ne pas avoir d’enfants, et a le droit d’élever ses enfants dans une communauté sécuritaire et viable. Tous ces droits ont été compromis par la violence coloniale et les oppressions.
Les principes de la CDAC sont ancrés dans l’antiracisme et l’anti-oppression. Nous condamnons toute forme d’oppression envers un individu ou un groupe, entre autres l’islamophobie, la position anti-palestinienne et l’antisémitisme, et nous nous y opposons avec véhémence.
Nous récusons l’association que certaines personnes font entre les Juifs et le gouvernement d’Israël, ainsi que toute rhétorique accusant les Juifs d’être responsables des actions du gouvernement israélien. Dans cet esprit, nous soutenons les efforts des Juifs antisionistes qui sont solidaires avec les Palestiniens de Gaza et d’ailleurs, notamment avec ceux et celles qui, historiquement et de manière systémique, ont été déplacés de leur terre natale.
Dans cet esprit, nous reconnaissons que l’antisémitisme et l’islamophobie ne pourront pas être éliminés tant que la Palestine ne sera pas libre, puisque les systèmes d’oppression sont profondément ancrés dans les mêmes systèmes dominants de colonialisme de peuplement, de capitalisme et de suprématie blanche.
Tandis que la CDAC déplore toutes les vies perdues et condamne toutes les violences, en particulier le génocide continu à Gaza, nous reconnaissons aussi qu’il y a eu des inégalités de pouvoir et que leurs effets continus ont mené aux événements qui se déploient sous nos yeux aujourd’hui. Bien que nous soyons une organisation nationale, basée au soi-disant Canada, et que notre travail se fait principalement dans ce contexte, nous savons que la justice reproductive et notre solidarité doivent être intersectionnelles.
Nous affirmons que ce qui se passe dans la Palestine occupée n’est pas seulement une crise humanitaire, mais il s’agit intrinsèquement d’un enjeu de justice reproductive. Selon les piliers définis par SisterSong, il ne peut y avoir de justice reproductive complète dans un contexte de violences contre les familles palestiniennes et de déplacements constants de ces populations depuis des décennies, remontant à la Nakba. Nous soutenons les appels pour un cessez-le-feu permanent et une fin définitive de l’occupation.
Nous sommes particulièrement préoccupés par l’impact de cette violence et de cette occupation continues sur les personnes enceintes, les familles et les enfants. Jusqu’ici, 30 000 Palestiniennes et Palestiniens ont été tués ; 50 000 personnes sont présentement enceintes à Gaza, et plus de 180 donnent naissance tous les jours sans accès à des soins périnataux.
Plus de 560 000 Palestiniens et Palestiniennes, dont une forte proportion sont des enfants, sont menacés de famine, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU. De plus, des dizaines de milliers de parents sont en deuil de leurs enfants, et des dizaines de milliers d’enfants sont devenus orphelins. Nous nous inquiétons aussi des conséquences profondes et durables des traumas que vivent les enfants palestiniens en raison de l’occupation et du génocide continus, et qui nuisent directement à leur capacité et à leur droit de développer leur plein potentiel, comme l’explique l’UNICEF.
Plusieurs groupes et organisations en Amérique du Nord et dans le monde ont fait un lien entre la justice reproductive et la libération de la Palestine ces 150 derniers jours (voir les liens suggérés ci-dessous). Nous vous invitons à en apprendre plus sur ces intersectionnalités, et à suivre les Palestiniens et Palestiniennes qui surveillent et documentent cette crise humanitaire et ses effets. Nous vous encourageons aussi à faire preuve d’esprit critique face à ces informations, dans le cadre de vos démarches pour en apprendre plus sur le génocide en cours et la justice reproductive, comme le font nos membres.
Nous sommes solidaires avec le peuple de la Palestine et nous considérons sa libération comme un enjeu féministe. Nous croyons que tout le monde a le droit de vivre librement et en paix, et a droit à l’équité, peu importe sa couleur de peau, son origine, sa nationalité, sa religion et d’autres facteurs intersectionnels. La justice et les droits reproductifs ne s’arrêtent pas à l’avortement ; nous sommes résolument solidaires et nous adhérons au point de vue critique du féminisme intersectionnel dans tout notre travail, y compris dans la lutte pour la libération de la Palestine.
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Ressources (en anglais)
An Extensive Guide on How to Support Palestine, par Spark & Co. : « a Community Interest Company in the UK dedicated to racialised people and communities ».
Ad’iyah — Reproductive Justice Collective (Instagram) : « Providing support, love & dua for Muslims and their communities throughout their pregnancy ending journeys ».
HEART (Instagram) : « We work to advance reproductive justice and uproot gendered violence by establishing choice and access for the most impacted Muslims ».